13 décembre 2007

Ero

Souvent, me réveillant dans l'autobus, un peu confus quant à l'heure qu'il destination, il m'arrive de voir une fille, à côté de moi ou sur le banc voisin, et d'avoir un subit et puissant désir pour elle. C'est rattaché à l'espèce de chaude sensualité du sommeil, cette proximité avec son propre corps qui prend quelques instants à se dissiper après le réveil.

De façon similaire, parfois quand je marche, je me perds dans mes pensées, et puis tout à coup, disons à une lumière rouge, je m'arrête et vois une Beauté Rare à côté de moi, et j'ai envie de lui dire: "Excuses-moi, est-ce que je peux t'embrasser?"

À ce moment précis, c'est la pulsion qui prime et c'est complètement naturel, mon esprit n'y voit absolument rien de répréhensible, et j'ai du mal à comprendre pourquoi on ne pourrait pas se laisser aller à ce geste inoffensif… pourquoi, disons, je ne pourrais pas l'embrasser, lui souhaiter une bonne vie, et puis continuer mon chemin.

Puis la raison s'active, et la logique du désir ne tient plus.

* * *

Si je te voyais, Julie… si après toutes ses années je te revoyais enfin… le Désir serait Tout. Grâce à toi j'ai appris l'amour, le désir, l'obsession, la passion… investi de ton Existence toute la résonance de ma Géographie en était altérée… partout où j'allais je te cherchais, et ta Présence me suivait dans mes plus lointains déplacements… j'étais marqué au fer rouge… et c'est parce que j'étais atteint d'un amour incurable pour toi que je n'étais intéressé par aucune autre fille… je ne pouvais pas concevoir qu'un jour nous ne serions pas Ensemble.

Et pourtant c'est ce qui est arrivé.

Je ne t'ai pas vu depuis plus de dix ans, mais pourtant je n'ai rien oublié de toi. Si je te voyais aujourd'hui, maintenant dans la jeune trentaine tout comme moi, je suis certain que je serais conquis par la splendide maturité de ta Beauté. Et --- pourtant complètement éveillé --- je ressentirais indubitablement le désir (le besoin) quasi irrésistible d'embrasser ce succulent petit sourire moqueur qui contracte ta bouche…

Ma belle Lionne, il est préférable que l'on ne se revoit plus jamais.

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