29 septembre 2006

Ôde à la Brisure

[Vendredi 29 septembre, 8:09 am, je suis à mon bureau depuis quelques minutes et j'ai décidé (en quelque part entre le métro Place-des-Arts et l'immeuble où je travaille) qu'aujourd'hui, à l'improviste et de manière improvisée, quelques phrases à la fois tout au long de la journée, je composerais un texte pour mon blog, ne sachant pas où je m'en vais ni la longueur que ça aura, tout simplement pour garder la forme et donner libre cours à cette excitation légère que me procurent encore les vendredi. Aussi, parce que ma charge de travail actuelle fait en sorte que j'ai des petits trous par-ci par-là, durant lesquelles je peux furtivement noter quelques mots. Évidemment je vais devoir m'envoyer ce texte par e-mail, avec la forte possibilité que l'on lise mon message (j'ai dernièrement eu la preuve qu'ils leur arrivent de lire les courriels sortant), mais tant pis.]

Autant pour moi que pour M., ma Compagne, l'arrivée imminente de notre troisième enfant semble de plus en plus vraie, de plus en plus près. Quelques semaines et puis on y est. C'est prévu pour tard au mois de novembre mais qui sait? X. était deux semaines en retard, C. deux semaines en avance. Tout est possible. Une naissance; un congé. Six mois à ne plus être obligé de me lever le matin; six mois à pouvoir me faire accroire que je suis libre. Six mois à être payé par le gouvernement pour ne rien faire d'autre que passer du temps avec ma famille. J'ai encore du mal à imaginer ce que ça va faire à mes humeurs, à mes états d'âmes, à ma dépression innée, à mon corps, à mon intellect, mais je sais que ça s'en vient vite, et je sais que je ne trouverai pas "le temps long", contrairement à ce que la plupart de mes collègues masculins disent. Vous êtes si inconfortables que ça avec votre famille, avec votre liberté? Difficile pour moi de comprendre. Je m'en fous, je ne veux même pas comprendre leur point de vue. Perte de temps. Déprimant. Rebutant.

En fait, j'essaie de ne pas trop y penser. Je veux que la naissance de mon enfant soit une renaissance pour moi. Partir à neuf, avec une coupure drastique et douloureuse s'il le faut, déstabilisante au maximum. Ça va commencer dans le drame, une naissance angoissante comme elles le sont toujours, mais encore plus cette fois-ci puisque ce sera chez nous, sans "professionnels", sans sage femme, en famille, peut-être avec des amis pour nous aider avec les enfants.

Mais après...

X. et C. auront leur père chaque matin… n'auront plus le cœur brisé à chaque jour de constater que je ne suis plus là (et je n'exagère pas, je ne m'accorde pas plus d'importance que j'en ai, c'est réellement ce qui se passe, avec X. surtout, il ne comprend pas --- avec raison --- cette nécessité pour son père d'aller "gagner de l'argent" à des dizaines de kilomètres de sa maison). M. aura quelqu'un pour s'occuper de tout pendant qu'elle récupère. Le nouveau bébé (fille ou garçon, nous ne le savons pas encore) entendra ma voix tous les jours dès le début, et pour la totalité de ses premiers mois. Et moi… moi… je retrouverai pour longtemps la bulle hermétique de la Maison. Je n'aurai pas eu l'opportunité de baigner dans une domesticité lente et immersive et narcotique depuis quoi… 1996? L'année qui précède la mise en branle de mon "âge adulte"… j'étais alors chez ma mère, l'aidant avec le ménage, les tâches ménagères, allant chercher le panier alimentaire le vendredi, lisant et écrivant et pensant et souffrant et n'ayant pas envie de faire autre chose… je serai maintenant trois fois père et tout aussi désireux de ne rien faire d'autre que d'être avec eux, lire, écrire…

Je vais d'ailleurs faire de gros efforts pour m'établir un semblant de routine à ce sujet. Même si ce n'est qu'une soirée par semaine, une demi-heure par jour, n'importe quoi, en autant que ça avance un petit peu de façon régulière. Pouvoir finalement finaliser le chapitre 9 de mon roman (parce que ces temps-ci ça n'avance vraiment pas), poursuivre le chapitre 10 qui est déjà bien entamé. Aller de l'avant. Me rapprocher de la fin, cette dernière portion de l'histoire à laquelle je pense si souvent et de manière si convaincue.

Toute l'entreprise de mon premier blog aura eu ça de bon: je suis plus convaincu que jamais de la nécessité pour moi d'aller de l'avant dans mon écriture, sans pour autant avoir de "grande raison" de le faire. Parfaitement confiant et parfaitement indifférent à la fois. Dédié à mon écriture sans le moindre désir de publier. Personne ne réussit à me convaincre que la publication représenterait un aboutissement. Ça ne me servirait à rien d'autre que de me glorifier, de perdre de mon temps, et de couper des arbres. (Et puis de toute façon c'est un cul-de-sac de même y penser; whatever it is that I do, it is not "publication material".) Je n'ai même plus la pulsion de partager ce que j'écris; je le fais ici, parfois, mais --- comme le titre du blog l'indique --- ce sont des bouteilles à la mer, et je ne crois pas réellement que ça va parvenir à ce destinataire hypothétique que j'envisage parfois en pensant à un texte ou à un autre. Les quelques histoires que je rends public en feuilletons… ne sont suivies par personne qui ne les a pas déjà lues (tu sais qui tu es). Statcounter me révèle que l'on va parfois faire un tour dans ces histoires pour survoler quelques chapitres, sans toutefois retourner en arrière pour lire les premiers, et puis que l'on ne revient pas vraiment pour lire la suite. Et vous savez quoi? Ça ne me dérange même plus. N'ayant aucune raison de les partager, je n'ai pas de déception si après l'avoir fait rien ne se passe. Continuer d'agir sans avoir l'Espoir comme combustible, c'est possiblement l'attitude qui me convient le mieux (de la même façon, je cherche à faire le bien de mon plein gré, sans que ça soit la Religion qui me l'ordonne et m'y contraigne).

Que l'écriture redevienne mon secret brûlant, mon Mystère ambiant, la variable algébrique qui vient qualifier et informer tous les aspects de ma vie. C'est ma Quête et ma Mission, c'est mon Sacré à moi.

Me remettre à dormir un peu plus, avec des nuits plus longues et des siestes occasionnelles. Recommencer à me souvenir de mes rêves et les noter, comme jadis je le faisais (avant que chaque nuit ne devienne un trou noir dont j'émerge le matin comme on sort d'un profond coma). Consacrer un peu de mon temps au ménage à chaque jour, pour que ça cesse de monopoliser des journées aux complet (ce que sont actuellement mes fins de semaine), et ultimement pour que je puisse m'amuser plus avec mes garçons. Enfin pouvoir dessiner avec eux; leur lire des histoire l'après-midi, sans cogner des clous; aller marcher, que ça soit dans le froid, le soleil ou la pluie, et apprendre en même temps qu'eux dans quel monde nous vivons; cuisiner avec eux; les inclure dans mes tâches ménagères (ce qu'habituellement je ne fais pas, étant limité dans le temps); regarder des films avec eux, chez nous et même parfois au cinéma; toutes ces petites choses qui sont propices aux échanges et à la communion et à la mémorisation des Moments Présents. Et puis, peut-être, écrire des petites histoires pour eux (car il m'arrive souvent d'avoir des idées qui feraient de bons petits contes brefs, mais ce genre d'inspiration exige qu'on s'occupe d'elle tout de suite, sans quoi la fraîcheur s'égare en chemin et il ne reste plus qu'une charpente inanimée et vide comme un cocon). Documenter un peu plus leur présent, aussi, noter ce qu'ils disent et ce qu'ils font et ce que je perçois de leur personnalité et de leur vision du monde (ce qui, je trouve, est le plus beau cadeau que je puisse faire à ces adultes qu'ils deviendront un jour). Aller me baigner avec eux, emprunter des livres à la bibliothèque. Peut-être effectuer quelques petites sorties (les musées à Ottawa, l'aquarium de Québec).

Contempler le Monde, sentir le vide paisible et la belle désolation d'une rue, la semaine, quand une grande portion de la population est soit au travail soit à l'école. Me vautrer dans la tristesse d'un centre d'achat, le lundi matin, avec les chômeurs, les personnes âgées, les mères de famille, ou les travailleurs qui font autre chose que du 8@4 9@5 5 jours sur 7. Fusionner les jours de la semaine en un tout un peu flou, sans grandes distinctions entre eux. Faire partie du monde sans y être officiellement impliqué, pour quelques mois du moins. Un fantôme contemplatif qui a le luxe de noter ses observations et ses réflexions. Tenir mon Journal de manière un peu plus exhaustive, un peu moins froidement, que ce que je peux le faire actuellement. (Ça ressemble à: "Lever à 5h10. Douche. Je me prépare. Départ à 6h20. Marche jusqu'à l'arrêt d'autobus. Express de 6h48 dans laquelle j'essaie de continuer de lire [livre du moment] mais finalement m'endors. Métro. Arrivée au travail vers 8h. Travail. Dîner à mon bureau vers 11h45. Je me promène un peu sur Internet. Je me remets au travail. Départ vers 16h15. Métro. Express de 16h50. Trajet durant lequel je continue de regarder [film du moment, avec mon lecteur DVD portable]. Arrivée chez moi vers 18h. Souper. Un peu de rangement en jasant avec les petits. Je leur donne leur bain vers 19h15. Après, successivement, couchers des petits. Je vais un peu sur l'ordinateur, me promène un peu sur les blogs, mets mon Journal à jour, puis vers 21h45 je remonte. Je fais la vaisselle, range un peu. Ensuite, je grignote un peu (craquelins + fromage), jasant avec M. qui regarde quelque chose à la télé. Vers 23h15, on va se coucher. Je lui masse un peu le dos, je mets ma main sur son ventre pour sentir le bébé qui bouge, puis on dort.")

Changer la nature et l'essence de mon rêve quotidien. Ne plus sentir l'urgence de veiller (et donc d'hypothéquer mon sommeil) pour avoir vécu un peu dans ma journée. Être capable de voir mon père, ma mère (qui, bien que séparés, ont des vies qui se ressemblent, ayant tous les deux arrêté de travailler) à d'autres moments que le samedi ou le dimanche, étant trop fatigué pour être content de les voir, ne le faisant que par une espèce d'obligation dénaturée. Passer un Temps des Fêtes tranquille et chaleureux, ayant le temps d'aller glisser avec les petits, de construire forts & bonhommes de neige dans notre cour, de pelleter de manière entraînée et enjouée (plutôt que pressée et frustrée), regardant ce ciel d'hiver qui me semble hanté et heureux à la fois. Pouvant sentir les jours qui passent, plutôt que de les subir.

Avoir le temps de faire toutes ces activités secondaires que j'ai envie de faire depuis des années… Mettre de l'ordre dans mes papiers, dans mes textes. Numériser mes photos, mes enregistrements d'enfance, mes vidéos maison, tous ces disques vinyles que je n'ai pas pu écouter depuis des années. Continuer de constituer mon Musée des Images Primordiales (ou l'Album Personnel d'un Humain Né à la fin du 20ème Siècle), un recueil d'images virtuel (commentées par moi ou par des citations) où je rassemble et catégorise tout ce qui me passe sous les yeux (toutes les manifestations visuelles du Petit Chaperon Rouge, par exemple, ou encore toutes les peintures de chevaux, ou toutes les représentations picturales de décapitations). Faire quelques petits travaux dans la maison, au niveau de la décoration, de la peinture, de l'aménagement, ce genre de choses accessoires et sans réelle utilité qui sont les premières à prendre le bord quand vient le temps de prioriser. Aller prendre des grandes marches le soir, quand les rues sont vides, comme je le faisais avant la période de ma vie que j'appelle "L'Ère du Travail". Me plonger dans les ivresses sans me mettre à bailler après vingt minutes parce que je suis trop fatigué. Peut-être aller voir des spectacles, si j'apprends que des artistes que j'aime viennent se produire à Montréal. Faire de la photo, notamment dans les lieux marquants de ma vie (McMasterville, Beloeil, St-Hilaire, Longueuil, Montréal, Lasalle, Verdun). Retourner à la bibliothèque du Cégep Édouard-Montpetit, où j'ai fait mon DEC (en Lettres), question de retrouver ce livre encyclopédique sur la littérature fantastique (car sur la couverture il y avait la photo d'une femme tenant un parapluie, et ça me hante depuis des années… je me souviens qu'on indiquait son nom, mais tout ça est avant l'Internet, je n'avais aucun moyen de trouver qui elle était); en profiter pour aller saluer mes deux professeurs de cinéma, Christian Rasselet et Jean-Antonin Billard (quatre cours de cinéma qui ont justifié à eux seuls ces cinq sessions de pertes de temps). Finalement demander à mes parents de se livrer par écrit pour me raconter leur vie (ça pourrait être par e-mail avec mon père, par la poste avec ma mère). Prendre des bains, le soir, avec un livre, comme avant...

Trop de rêves, trop d'attentes? Sans doute. Mais je préfère ça plutôt que "Ah… je vais trouver le temps long… je vais avoir hâte de revenir travailler…".

Libre, complètement (ou en tous cas autant qu'on puisse l'être dans mes circonstances), pour la première fois depuis l'enfance en fait, car même en 1996 j'avais des attentes sur les épaules… on s'attendant à ce que je me branche, que je m'engage dans un Chemin Professionnel, que je m'active, que je sorte, que je fasse quelque chose de moi, que je me trouve une job et que je me trouve une blonde et que je me trouve tout court. Là, je m'appartiens complètement, la job je l'aurai encore, elle m'attendra patiemment au bout de mon congé.

Je considère que je suis extrêmement chanceux de me retrouver dans cette situation. Je m'attends presque à ce qu'une catastrophe survienne, en bon pessimiste que je suis. Que subitement je meurs, que ça se complique à l'accouchement, ou encore tout simplement que l'on ait mal calculé notre affaire et que le 75% de mon salaire auquel j'aurai droit ne soit pas suffisant pour subvenir à nos besoins, ce qui m'obligerait à retourner au travail plus rapidement.

Ça sera une période unique dans ma vie, la seule où je pourrai faire pleinement partie de ma famille à l'âge où mes enfants sont encore jeune. X. est probablement assez vieux pour s'en souvenir plus tard. Il se rappellera d'une Saison hors-du-commun où son père était toujours là, présence majeure dans la vie intérieur d'un enfant. (Je n'ai qu'à penser à mon enfance, mon père ne travaillant pas à l'extérieur comme ceux de mes amis, mais restant à la maison, créant et fabriquant ses bijoux dans le sous-sol de notre grand appartement à McMasterville; il est plus qu'évident que l'ambiance et la saveur de ces années là ont en grande partie fait de moi ce que je suis.) Quant aux deux autres, C. et le ou la troisième, et bien si cette Saison ne s'inscrit pas clairement dans leurs souvenirs, je suis certain qu'ils en garderont tout de même des acquis psychiques, des traces inconscientes déposées au fond de leur cerveau comme des sédiments, figées dans le matériau de leur personnalité comme des fossiles.

[Je parle et je parle, ce texte est trop long et il répète des choses que j'ai déjà dit ailleurs mais je n'en ai absolument rien à foutre. Awèye un autre café, keep 'em comin' boys.]

Quand est-ce que je peux vraisemblablement espérer un autre répit du genre? À notre quatrième enfant, si quatrième il y a? Un congé sabbatique, dans quelques années, si mes patrons me l'accordent? La retraite, si je me rends là?

Non, je n'en espère pas d'autres. Que je me trompe ou pas, je considère ce qui s'en vient comme ma seule et unique chance de fuir (car ici il s'agit de fuite, même si elle n'est que de courte durée) ce que j'appelle ailleurs "La Citadelle", c'est-à-dire ce monolithe massif dans lequel on nous coule comme du métal en fusion lorsqu'on atteint non pas l'Âge de Raison, mais l'Âge de Production.

(Comme je le disais il y a quelques jours à mon amie M., on ne devient pas "pris"… on naît "pris".)

Tout faire pour en profiter pleinement, pour que rien ne soit gaspillé, même quand je ne fais absolument rien.

L'occasion rêvée de mettre en pratique ce précepte que je me suis noté le 19 août passé:

"Je dois vivre avec une ambition démesurée
comme si j'étais Immortel
mais avec le plus grand discernement
comme si j'allais mourir demain."

7 Commentaires:

Salut Simon,
C'est un beau texte, qui me rends un peu triste, je ne sais pas pourquoi.
Mais je t'écris surtout pour te dire ceci : j'ai eu également un cours de cinéma avec Jean-Antonin Billard, quand j'étais au cégep (je suis allé aussi à Édouard-Montpetit, mais en sciences pures - eurk). C'était en 96 je crois. Un cours marquant : il ne cessait de traiter tout le monde d'inculte dans la salle parce qu'ils jacassaient et ne l'écoutaient pas, mais moi j'écoutais attentivement, et j'étais un des seuls à avoir eu de bonnes notes. Les films que j'avais vu là m'avaient marqués (Le cuirassé potemkine, Les temps modernes, Citizen Kane, Les ordres). 4 cours avec lui, ça devait être super.
Bonne soirée.

Simon said...
Merci Jean-Philippe, j'apprécie.

Ce que tu décris des cours de Billard ressemble à mon expérience, seulement moi c'était en 93 je pense. J'ai eu deux cours avec lui, deux avec Christian Rasselet. Les Ordres, Citizen Kane, Les Temps Modernes, oui, de beaux moments dans une période personnellement très noire.

Louise said...
Est-ce que je sais qui je suis ? ;-)Pas vraiment. À vrai dire, j'y pense de moins en moins; mais par contre, je pense de plus en plus que je deviens; et plus je deviens on dirait que moins je suis...Y'a un philosophe qui rôde sur ton blogue, mon cher Simon, je sais pas s'il peux m'éclairer un peu là-dessus afin que je fasse mastiquer ma petite lanterne " d'Aristote " sur ce sujet pour le moins " épineux ", s'il a un peu de temps, bien entendu...Et même si j'en connaissais plusieurs passages, j'ai bien apprécié ma visite...à tes mots...Merci et Bonne Nuit.

Simon said...
Merci Louise.

Je ne saisis pas trop ce que tu me dis au sujet de Devenir vs. Être. Ça mérite des élaborations ailleurs que dans un commentaire, je pense.

Louise said...
Une elbowration ? ;-) Non, les coudes de mon âme souffrent déjà assez comme ça ;-) J'ai écrit ça hier soir sans vraiment savoir ce que j'écrivais...(encore une fois) je pense que ça sert à rien avec moi d'essayer d'élaborer quoi que ce soit, dans les mots comme dans les pensées; c'est pas de ma faute, ce sont mes « effets-mères » qui me font écrire de telles choses...Doit bien exister un mot en quelque part, juste un seul, qui comprendrait TOUS les autres, ceux de la dite Élaboration, ;-) Je le cherche encore ce mot unique, ce mot rempli de tous les autres, qui ne voudrait probalement rien dire lui aussi..Ce sera mon ultime projet pour les mois qui viennent. Je pensais bien l'avoir trouvé jeudi soir dernier, dans cette pièce, mais ce n'était pas encore lui, ce n'était pas celui qui s'appelle POÉSIE...

Simon said...
Un seul mot? Vivant.

Louise said...
VIVANT, peut-être...oui, LIVE...
octobre 01, 2006 11:40 PM

26 septembre 2006

En vrac

TIDELAND, de Terry Gilliam

J’ai triché. Ça faisait trop longtemps que j’attendais. Et puis à sa sortie, au mois d’octobre, je doute fort d’être capable de me libérer quelques heures pour aller le voir (entre le travail, les enfants, les soins à la maman enceinte et le ménage, il ne me reste plus beaucoup de temps ou d’énergie… des plans pour m’endormir dans le cinéma). Alors voilà. Je l’ai trouvé, un rip presque parfait probablement tiré du DVD qui est sorti (légalement) en Russie.

Que dire? C’est le film que j’attendais, mais en même temps je ne m’y attendais pas. C’est fort probablement le plus triste de tous ses films (mais peut-être que je me dirais la même chose si je revoyais Brazil, The Fisher King, 12 Monkeys). Ici, rien, sauf l’Imagination, dénuée de son potentiel rédempteur ou psychotique. L’Imagination, pure, pleine de souffrance et de la plus sublime des incertitudes. Tout bascule, tout penche, tout chavire, et le son qui sort de la bouche est tout de même plus près du rire que du cri. La plupart du temps.

Je l’ai regardé deux fois, déjà, et je sens que je ne suis pas près de m’en lasser ou d’en être insensible. C’est trop près de moi, la lame tranche jusqu’à l’os.

Je n’ose pas trop en dire, de peur de gâcher quoi que ce soit pour vous qui peut-être le verront, alors je vais m’arrêter ici.
* * *

Je baigne dans les films, ces temps-ci. Baraka, Latcho Drom, Rushmore, Napoleon Dynamite, Buffalo 66, Tideland, Shadow of a Doubt, tous ils m’ébranlent et m’éblouissent… c’est à se demander si je suis encore capable de m’ennuyer devant un film. J’ai peut-être perdu tout sens critique. Quelle joie si c’était vrai. Quoi de plus triste que de ne plus être capable d’aimer quoi que ce soit?

Prochainement: Les Ailes du Désir (trop hâte de revoir Nick Cave & the Bad Seeds faire The Carny), Waking Life, Céline et Julie vont en bateau (la description que Jonathan Rosenbaum en faisait dans son livre Placing Movies -- The Practice of Film Criticism avait réellement piqué ma curiosité), Trust (de Hal Hartley, film que j’ai vu à Lyon en 1996 et qui m’avait fait un drôle d’effet), The Proposition (un autre film que j’attends depuis longtemps, qui vient de sortir en DVD, écrit et mis en musique par Nick Cave), Prospero’s Books, El Topo. Et cetera.
* * *

Je salue ici Jean-Philippe Morin (si tu le veux bien, je cesserai de t’appeler "Darnziak", puisque tu as déjà manifesté le désir de t’éloigner de ce pseudonyme, et que moi-même j’ai une aversion assez prononcée envers les pseudonymes, alias, noms de plume et autres cachoteries), dont c’est l’anniversaire cette semaine, et dont la dernière entrée de blog, appelée "Qu'est-ce que tu veux faire, quand tu seras grand?", m’a touché comme lui seul semble le faire.

Tout est dans cette phrase: "On dirait parfois que je ne veux plus rien. Je perds le cap, je me perds dans des bancs de brouillards. Pour moi, la fin de la vingtaine ressemble à un interminable banc de brouillard. Tout est devenu blanc, je ne vois plus rien."

À 31 ans, il me semble que je commence à peine, peut-être, à sortir de ce brouillard qui m’est si familier. La Blancheur me guette toujours.

5 Commentaires:

Louise said...
Bonjour Simon,

Tu vois, moi, le cinéma, ça ne me branche presque plus, sans doute parce que j'en ai trop vu depuis le temps où je restais à la maison à visionner comme tu le fais unpaquet de films qui nous évadent de notre quotidien . Mais ça demeure quand même la plus belle évasion je pense quand la jeune famille nous retient plus à la maison qu'ailleurs. Il est vrai que j'ai beaucoup plus de temps à accorder aux sorties LIVE..La vie passe par là, sous nos yeux réels, dans ces salles de concerts, de théâtre, de jeux, dans les bars où tu peux parfois y voir s'y dérouler des scènes que t'auras jamais même vues dans le meilleur des films de Gilliam..;-) Je te dis pas ça pour que tu te mettes à sortir et à négliger ta famille, non, mais de temps en temps, voir un Artiste exécuter son art en plein vol, en plein chant, ou en pleine parole, a de quoi venir satisfaire l'Inspirée que je demeure et lui faire déverser des torrents de mots nouveaux....Voilà, tu vois, il suffisait que tu écrives ces mots-là pour que je le sois encore une fois... J'aime toujours quand tu écris.

Étrange, je t'ai écrit un commentaire, et ça affiche 0, mais on le voit quand même..je réessaie.

Merci Simon, c'est gentil. J'ai parfois l'impression que les choses devraient s'éclaircir, passé 30 ans, je ne sais pas pourquoi. On en reparlera...

(Pour ce qui est de Darnziak, je suis enregistré sur blogger avec ce nom alors je dois bien assumer que ce soit mon « nom » sur le net... mais ce n'est pas un pseudonyme, c'est certain).

Louise said...
Bonne Fête encore cher DARNZIAK...;-)

Simon said...
Louise: D’abord, si je regarde des films ce n’est pas pour "m’évader de mon quotidien". Je trouve que c’est une mauvaise façon d’aborder la chose. Je ne cherche pas à fuir, je cherche à connaître. Je ne cherche pas à oublier, je cherche à comprendre.

L’Imaginaire fait partie de mon quotidien; c’est peut-être pour ça que je n’aborde pas ça ainsi.

Je ne me sens pas du tout "retenu" par ma famille. Mes enfants, ma Compagne, l’Imagination, c’est un tout dont je ne saurais me passer. Le cinéma est une nourriture, au même titre que la lecture et la musique. Même chose pour les histoires que j'écris. Ça enrichi mon quotidien. Ça lui est parallèle et non perpendiculaire. Jamais je ne réussis à m’évader de ma tête. Bien chanceux ceux qui en sont capables. Et puis je regarde des films dans mes longs trajets d’autobus et pendant mes longs trajets de vaisselle, question d'optimiser le peu de temps que j’ai.

Je suis conscient de la magie d’un événement "live"... j’aurais d’ailleurs beaucoup aimé voir Silver Mount Zion, le 5 septembre dernier, mais j’ai tout de même pu écouter ce que ça a donné (merci à la personne qui a enregistré le show), et comme ça, comme un fantôme, j’ai l’impression d’avoir été là, un peu.

Jean-Philippe : Oui, on en reparlera, j’aimerais ça.

25 septembre 2006

Conseil à moi-même

Retiens ton Jugement. Regarde. Respire. Hume. Réfléchis. Retiens ton Jugement. Sois patient. Pense. Ne sois pas hâtif.

Éventuellement, la Nécessité de porter un Jugement cessera de s’imposer, et la Compréhension de ce que tu contemples n’en sera que plus sereine.

Et la Sérénité, c’est tout.

6 septembre 2006

Bile [Réaction à des propos sur Sylvain Trudel]

Je viens de lire ceci; je n'ai pas ressenti une colère comme ça depuis longtemps. La mauvaise foi vinaigrée qui se dégage des premières lignes de la critique de ce Tristan Malavoy-Racine, l'indignation de petit bébé gâté à qui on refuse son nanane, son privilège de Grand-Critique-Chef-de-Pupitre-depuis-3-ans… il va même jusqu'à nous citer une liste d'auteurs, comme un général qui fait briller ses médailles. Et puis quelques crétins qui renchérissent dans les commentaires (question de gagner des "jetons"), un qui fait peut-être dans l'ironie de mauvais goût, et une autre qui s'indigne au nom de son Grand-Critique bien-aimé.

J'ai envie de frapper. Moi, l'Éternel Endormi.

Si ils savaient pourquoi Sylvain a refusé… Lui ne fait qu'aller au bout d'un engagement personnel, et eux, les parfaits petits parasites culturels, au lieu de LIRE LE LIVRE, ils font leur petit discours de con, leur petit papotage de Salon. C'est ça qui m'enrage le plus, pas ce qu'ils disent, mais le fait qu'ils laissent aller leur sale langue dans un espace publique sans se soucier une seule seconde de ce qu'il y a derrière ce refus, sans se soucier non plus de ce que ça peut faire à Sylvain qu'on s'imagine qu'il "rit dans sa barbe" ou qu'il fait preuve d'irrévérence.

Irrévérence! Il devrait donc faire preuve de révérence? Quoi d'autre encore!

Je ne possède pas l'éloquence pour dire ce que je ressens, et pourquoi ça m'affecte autant. Tout ce que je sais, c'est qu'il y a ici Injustice & qu'il y a ici Outrage (aussi petit que ça puisse être à l'échelle du Gigantesque), et j'espère qu'il y aura quelqu'un de plus influent que moi pour le dire.

Bonne rentrée littéraire Automne 2006!

7 Commentaires:

Salut. Depuis un certain temps, je me dis que c'est meilleur pour ma tension artérielle de ne jamais lire les commentaires sur le site du Voir. J'en venais à mordre les murs. Souvent les gens n'ont même pas lu le livre en question... Erk.
Bonne soirée à toi.
Simon said...
Salut.

C'est un bon conseil. Je pousserais même jusqu'à dire qu'il est peut-être préférable d'éviter le Voir au complet.

Content de te croiser de nouveau.
Oui, d'ailleurs j'évite maintenant presque tout le Voir, sauf la chronique de Dickner qui me plaît bien.
Au plaisir!
Simon said...
Oui, si je pouvais je remercierais ce cher Monsieur Dickner de m'avoir fait découvrir la librairie The Word, sur Milton. À deux minutes d'où je travaille, et je l'ignorais depuis toutes ces années!
Marie-Hélène Trudel said...
Colère ! Je peux dire que j'en ai ressenti de la colère en lisant le texte de M. Malavoy-Racine et les réactions des membres.
Mon frère, irrévérencieux, peureux du papotage, impertinent, inconscient !!! Franchement, ils ne le connaissent vraiment pas pour le qualifier de cette façon.
Jamais, ils n'ont penser que les raisons qui le poussent à refuser toutes entrevues à qui que ce soit, ne soient pas diriger contre eux et en fonction d'eux. Personne n'a pensé qu'il y avait peut-être des enjeux bien plus sérieux qu'une compagne de promotion ?
Laissez-moi vous dire que mon frère est un homme dévoué, respecteux et sensible aux autres comme il ne s'en fait plus. Et je ne laisserai personne venir ternir son intégrité.
Simon said...
Chère Marie-Hélène, je vous salue et je vous remercie d'avoir pris le temps d'intervenir. Je connais votre frère pour avoir correspondu avec lui, pour l'avoir rencontré à quelques reprises aussi, et je suis parfaitement d'accord avec la description que vous en faites. Je ne suis donc pas le seul à avoir été mis hors de moi à la lecture de ces commentaires.

J'espère que vous percevez tout le respect et toute la considération que j'ai pour Sylvain.

Bon courage à vous et aux vôtres.
Marie-Hélène Trudel said...
C'est moi, Simon, qui vous dit merci d'avoir écrit ces quelques lignes.
N'ayez crainte, j'ai très bien perçu votre respect et votre sympathie envers mon frère.
Il me fera donc plaisir de revenir vous lire.
À bientôt !