24 novembre 1994

24 novembre. 11h27. Dans mon lit.

"Ils ne m'ont rien dit! Ils le savaient, ressentaient le vide, mais ne m'ont rien dit! Ce qu'ils m'ont fait accroire, c'est le conte de fée sans vérité. Au moins, dans "Barbe-Bleu", y'a de la vérité..."

Voilà ce qu'il dit, le sentiment que je ressens en ce moment.

D'une façon ou d'une autre, je reproche quelque chose à mes parents, à tout le monde.

- S'ils sont "conscients", je leur reproche de m'avoir mis au monde.
- S'ils sont "inconscients", je leur reproche de prétendre être "conscients", et de m'imposer cette prétention.

Quel ingrat je suis.

Avec tout ce que j'ai écrit, quand je vais mourir, ça va être facile de tout mettre sur le dos de la folie, du problème mental, du défaut de mon intellect, du déchu de mon psychique.

En un crisse de fatiguant de Nelligan de plus pour alourdir la conscience de tout ces bons québécois qui mangent de la dinde à Noël, qui jouent au badminton l'été, qui vont en Floride l'hiver, qui écoutent "Chambres en ville" et "Watatatow", qui aiment bien la bière au bistro du coin, qui baignent dans la graisse d'oreilles-de-christ pis dans le vomit de cabanes à sucre.

6 novembre 1994

Lire, pour moi, c'est se promener dans un couloir, dans lequel il y a des cellules remplis de monstres, et de farfadets.
                Une fois, tu ne fais que regarder à travers les barreaux, en te demandant ce qu'il y a à l'intérieur de la cellule (du livre).
                Une autre fois, tu ouvres la porte, tu entres, tu parles avec l'occupant.
                D'autres fois, la porte est barrée.  Le monstre ne fait que tenter de t'attraper à travers les barreaux.
                D'autres fois, tu explores la cellule, puis tu laisses la porte ouverte une fois que tu as fini, laissant le champs libre au monstre ou au farfadet, lui permettant de te suivre et de te surprendre quand tu n'y penses plus.
                Les variantes sont interminables.