26 juin 2008

À défaut de publier, quoi?

[Voici ce que je propose, bien humblement, pour le plaisir de jouer avec les idées, le tout étant pitché un peu n'importe comment, espérant qu'il n'y a pas trop de redites suite aux commentaires échangés avec Al.]

Multiplier les exemplaires de ses textes au besoin, à la pièce. En faire des artefacts uniques & travaillés, comme le faisait William Blake. Cracher au visage de la révolution industrielle et de ses "innovations". Si la pollénisation virale vous plait, alors au moins faites le sur Internet.

Passer outre les éditeurs (et leur "travail", et les échéances arbitraires) que sous-entend une publication officielle, cataloguée, et enregistrée. Nous sommes tous névrosés, bénificions tous d'un imaginaire merveilleusement craqué, alors --- dites-le moi --- quels avantages peut-on bien tirer de voir cet esprit créateur passer sous le scalpel d'un autre, dont la soit-disante "expérience" ne fait que rapprocher le texte des idéaux efficaces de la marchandisation?

Qu'il y ait des longueurs, des inconsistances, des redondances, des plagiats même, dans le fond, quelle importance? Et qui de mieux pour en juger que l'auteur lui-même? Vous tenez à plus de rigueur? D'accord. Mettez le manuscrit dans un tiroir, patientez, et revenez-y dans quelques années. Apportez alors vous-même les corrections qui s'imposent. Que ça soit votre œuvre à vous, avec ses verrues, ses asymmétries, ses imperfections. À vous. Sinon, à quoi bon se démener? À quoi bon prendre la peine de s'articuler?

(Ça fait autour de 14 ans que je travaille sur mon roman. La patience, je connais.)

De même pour la musique (privilégier la permormance musicale plutôt que l'impression de CDs, ça pourrait n'être disponible qu'en petites quantités, en vente lors de spectacles), le cinéma (le Hummer du domaine des Arts). Prenons la peinture: une œuvre, se trouvant à un endroit à la fois. Le théâtre: une œuvre, présentée pour une durée de temps limitée, par un groupe mobilisé.

Oui, je sais, c'est plus compliqué que ça, bla bla bla. Moi je dis: si c'est si compliqué, et bien il est peut-être temps de prendre la hache, et de simplifier.

Piler sur notre égo, et refuser de jouer le jeu. Se demander pourquoi on tient tant à publier, ce qu'on espère obtenir, et s'il n'y aurait pas un autre moyen d'y arriver.

(Ceci étant dit, il est clair que si je pense ainsi, c'est précisément parce que mes quelques essais de publications ne sont aboutis à rien. On se forge les opinions qui aident à justifier qui nous sommes. C'est en chacun de nous la démonstration irréfutable de nos imaginaires infinis, que nous sommes tous capables d'en arriver à se créer des idées, des arguments, qui appuient nos positions, quelles qu'elles soient. On est tous convaincus d'avoir raison, et de comprendre quelque chose que personne (ou peu de gens) sont en mesure de comprendre.)

Ralentir la cadense. Arrêter de penser en termes de qualité ou de quantité. Créer davantage. Quitte à ce qu'on lise plus de trucs artisanaux, en constante évolution, brochés à la main, mal foutus, avec des fôtes, sans belle maquette de couverture, sans jamais en avoir lu une critique préallablement dans Nuit Blanche ou dans Lettres Québécoises (des "Protégez-Vous" dont le consommateur averti doit prendre connaissance pour ensuite faire un choix informé).

Blah.

2 commentaires:

Alexie M a dit...

Je suis tellement d'accord avec ce que tu dis sur les publications plus artisanales, virales, etc. Mon argumentaire sur la publication (en excluant l'aspect monétaire) les incluait.

Idéalement, mon but serait de créer les occasions de publication, ou d'investir les lieux de publications... etc.

Au pire... ce que je voudrais, c'est publier chez un éditeur ami. Trouver (parce que ça doit bien exister, non je te le dis qu'on m'a dit que ça existait) un éditeur pour qui le fait de disperser l'art est aussi important que le pratiquer l'est pour nous. Et collaborer avec lui.

L'éditeur qui voudrait m'en imposer (ce qui ne veut pas dire que je ne serais pas prête à accepter sa critique éditoriale), à la fin, ne me publierait pas. Parce qu'un éditeur sérieux et minutieux et plus attentif aux contraintes de la pratique de l'écriture qu'à celle du marché aura nécessairement quelque chose de pertinent à me dire. Ce, dans la mesure où je souhaite plutôt être comprise (mais comprise dans ce que j'ai de plus vrai et plus honnête)et toucher réellement l'autre, que protéger le fruit parfois illisible de mon inspiration et de mes émotions brutes.

Ne pas voir partout où il y a entreprise le démon immonde de l'économie. Oser chercher des humains compréhensifs, sensibles, où l'on ne les soupçonnerait pas.

Sinon, fuck off !

C'est pas ce qui m'empêcherait de créer...

Aimon a dit...

Tout ce que tu dis me semble plein de bon sens, et de maturité.

J'espère que, le temps venu, tout se passera comme tu veux.

Salutations.