13 avril 2008

Dilemme [troisième partie, là où lentement je perds le fil de ma réflexion]

Quand ma Compagne m'arrive avec ce projet, donc, de déménager, de drastiquement tout changer, il y a comme une étincelle qui se produit en moi, là où je ne vois que du noir depuis des années.

Le fantasme s'installe, dans lequel nous partons, nous installons loin, dans un milieu plus libre et libéré. Je me vois moins accaparé par le travail, voire sans emploi, passant mes journées à tripper avec mes enfants, faisant partie d'un foyer familial pauvre mais uni et sain d'esprit, pouvant me baigner plus souvent dans mes envolées imaginaires, retrouvant le plaisir de me laisser aller à l'écriture. Retrouvant le goût et la texture de qui je suis, ai toujours été.

Et puis le pendule revient, et je me dis que non, ça ne marcherait pas, ou du moins pas pour longtemps. Je devrai occuper un emploi stable et relativement payant, si je veux être capable de nous supporter.

Un autre emploi en informatique? L'idée me donne envie de vomir mes organes vitaux.

Un autre genre d'emploi? Je ne vois pas en quoi ça serait mieux. "Trade in your hours for a handful of dimes," dans les mots de Jim.

On essaie alors de m'enchanter en me disant que je pourrais me dénicher quelque chose de mieux, travailler dans une librairie, être facteur, mais je n'y crois pas. Je n'y crois pas.

Je suis donc devant la réalité suivante: ma Compagne veut partir, et c'est moi qui a le rôle de salarié dans cette famille, alors je dois me faire à l'idée de transporter ma Mélancolie ailleurs, tout en prétendant (sinon à moi-même disons pour le reste du monde) que de changer quatre vingt-cinq sous pour un dollar me convient parfaitement.

Et le dialogue interne se poursuit:

- À moins que… avec un peu d'audace et un peu d'efforts…
- Non, tu rêves.
- Oui mais si…
- Si, si, si… on n'a pas le luxe de tout miser sur des possibilités et des "peut-être".
- Oui, mais…
- Non. Il est trop tard. Tu as fait tes choix, il faut vivre avec. Tu as des bouches à nourrir.
- Oui mais…
- Non. À quoi bon tout chambouler?

Etcetera.

Au final, je me retrouve avec ces constats, et ils me semblent indéniables:

1) Un changement s'impose pour ma Compagne
2) Nous n'avons pas les moyens de réduire de beaucoup notre rentrée d'argent
3) Il faut donc que je garde le cap dans mon orientation actuelle, soit l'informatique

Découragé par le cul-de-sac mental dans laquelle ça me laisse, je dois donc me résigner à:

1) Fournir avec ma Compagne les efforts de réflexions menant au changement dont elle a besoin
2) Trouver un emploi qui serait à peu près aussi payant que celui que j'occupe actuellement (ce qui, implicitement, viendra orienter la nature du changement)
3) Aller poursuivre ma désintégration solitaire ailleurs

Encore et encore, j'essaie de reprendre l'équation du début, question d'en arriver à une autre issue, mais invariablement j'arrive au même résultat.

Et la pression augmente. Et je suis de moins en moins capable de communiquer avec ceux qui m'entourent. Et la pression augmente. Et de plus en plus ma géographie intérieure est secrète et cloisonnée. Et la pression augmente. Et on le remarque, et on me demande si je suis heureux, et même si ce n'est pas "Oui" que je réponds on interprète mes réponses ambivalentes comme tel, on est soulagé que je ne dise pas que j'ai envie de me tuer, et rapidement on passe à autre chose.

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