27 mars 2008

Sátántangó

Sátántangó. Un film de Béla Tarr. 7h30. Presque tous les films que j'ai vus depuis me semblent ternes et bâclés. Un constat terrifiant, recelant à mon sens plus de violence dans sa portée spirituelle que n'importe quel film essayant de façon puérile de "briser les tabous" (les tabous, je m'en câlisse, je n'ai plus 11 ans).

Un film à revoir, encore et encore. Il me semble parfois que je pourrais ne plus regarder que ce film là, et ne jamais avoir faim pour une autre nourriture ciné-visuelle. Mon rêve: le voir en une seule séance, idéalement sur grand écran.

[Irimiás, le Faux Messie, interprété par Mihály Vig]

Sátántangó: C'est en utilisant la Vérité que le Fourbe peut faire le plus de mal.

OU

C'est avec la Vérité que l'on peut façonner le plus gros Mensonge.

OU

Utiliser la Vérité pour Manipuler et Détruire.

20 mars 2008

Salutations

Bonjour. Je m'appelle Simon, j'ai souvent envie de ne plus vivre, mais je continue.

Après des années
à ressentir l'Horreur
--- bâillonné par mon envie de vomir ---
ne reste finalement plus
que presque plus rien.




Feeling yourself disintegrate, The Flaming Lips

Mes blogs (et mes écrits) ne m'intéressent plus beaucoup, mais les vôtres (et --- par extension --- vous) oui. Ces petits messages, c'est ma manière à moi de vous rendre hommage, et de vous saluer, discrètement.

* * *

Darnziak: Bonjour à toi. Je tenais à te dire que je continue d'aller voir (et d'apprécier) tes dessins, et tes textes quand tu en partages. Une mention particulière pour l'entête de ton site, que je trouve épique, foisonnantes de détails. On aurait envie de la regarder à la loupe, cette image, d'y plonger (et j'avais cette même envie il y a un bon bout de ça, quand tu avais fais ta carte de la blogosphère).

* * *

L. des Fenêtres Ouvertes: Tu le sais, je suis ton blog tous les jours, et je trouve la variété de tes différentes notes à la fois rafraîchissante et déconcertante. Je ne vois pas toujours où tu veux en venir, ce qui motive telle ou telle entrée, à qui tu t'adresses (ou même si tu t'adresses à quelqu'un), mais qu'importe, ça fait partie du voyage que tu rends possible, et pour ça je te remercie.

* * *

Meth: Ah, que dire... tes souffrances récentes (et plus lointaines) sont palpables. Honnêtement, je ne sais pas ce que je deviendrais si je ne pouvais pas voir mes trois garçons…

Je souhaite (comme je le souhaite à tous et toutes) que ces souffrances s'estompent, s'éloignent, et restent loin. Pour le bien de tous. Ça me fait penser à ce que disait récemment Efrim Menuck (de Godspeed, Silver Mount Zion): "going through this really difficult time and feeling like there is a cumulative stress that adds up and adds up and adds up the older you get and at a certain point people around you just start buckling under the pressure." C'est l'effet domino, une personne qui Chute en entraîne inévitablement d'autres, et c'est en partie dans cette optique là que je me sens profondément interpellé par tes souffrances, ainsi que celles des autres.

We're all in this together, whether we know it or not, whether we want to or not.

* * *

Bonjour Evlyn.

Dernièrement, tu disais:

"J'aimerais cela travailler activement sur un projet avec quelqu'un de motivant, il me semble que je fonctionne mieux lorsque je travail avec des amis, mine de rien je suis une personne très sociale.

Mais bon personne n'a de temps ou d'énergie pour me renvoyer la balle activement et intensément, ah si un jour je rencontre quelqu'un avec une imagination combinatoire aussi fertile que la mienne je l'épouse sur le champ! Je suis en manque de retour d'imagination!
"

Comme beaucoup de monde sûrement, en lisant ça je me sens interpellé, c'est comme une belle invitation à tous les créateurs… en quelques secondes, je pense aux histoires que je pourrais t'envoyer, et qui grâce à ta vision deviendraient autre chose. Au haut de ma liste de projets potentiels, il y a deux trucs: mon histoire de Mortifer (un espèce de personnage fantômatique qui déambule le soir de l'Halloween), et mon roman, celui sur lequel je bûche depuis 1995, Marla & Philippe (les voyages de deux personnages qui fuient leur milieu, se rencontrent, et puis s'établissent ensemble).

Ça me fait rêver; ça ne m'arrive plus beaucoup, et de moins en moins. Bravo pour ton énergie, ton ouverture, et ta générosité.

* * *

Hellrider: Je veux juste te dire que j'admire beaucoup ton énergie et ta détermination, et que si je n'étais pas si solitaire, si profondément ermite dans l'âme, et si abattu aussi, je me démènerais pour essayer de me joindre à toi dans tes entreprises. Je ne peux pas m'empêcher de faire un constat d'échec face à mon incapacité à me lier --- amicalement ou artistiquement --- à des gens comme toi. Mais ça ne m'empêche pas d'applaudir tes efforts et tes réussites.

* * *

À vous, mes sincères salutations, et mes pensées les plus encourageantes.

Père, père…

[J'écris ceci après l'avoir vu la semaine dernière, après avoir jasé quelques heures avec lui, alors qu'il me rendait visite pour mon anniversaire. Je résume ici ce que je savais, ce que j'ai appris, et ce avec quoi je me retrouve maintenant comme pensées.]

Mon père est déprimé. Suicidaire, même. Je ne l'aurais pas crû. Il a toujours été si maître de lui-même, si terre à terre et si profondément hippie en même temps, si stable dans ses entêtements, ses convictions et ses angles morts. Le voilà fragilisé, désemparé, en proie à une détresse déconcertante qu'il est incapable de réprimer, y étant si peu habitué.

Ça fait plusieurs années que ça ne va pas bien. Complètement terrassé par une maladie rare, il s'est lentement remis, affaibli mais toujours déterminé. Il ne s'est pas laissé abattre par ce rappel indéniable de son vieillissement et de son éventuelle mortalité.

Il y a quelques mois, il s'est mis à prendre un médicament pour arrêter de fumer. Lentement, il a vu ses énergies diminuer encore davantage, au point de ne plus avoir envie de se lever le matin, lui toujours si matinal, passant une bonne partie de la journée au lit. Il s'est mis à broyer du noir (chose qui lui arrivait à l'occasion, de par le passé, mais --- à ma connaissance --- c'était toujours déclenché par un événement externe). Il a éventuellement été pris de crises d'anxiété, sans raison.

Un jour, en prenant son café, il s'est demandé: "Si je me suicidais, comment je m'y prendrais?"

Allant à la pharmacie, la dame au comptoir lui a demandé comment ça allait, avec ses médicaments. Spontanément, il a répondu: "Comment ça va? Vous voulez vraiment l'savoir comment ça va? J'me sens comme d'la marde, pis j'ai envie de m'flusher."

Il y a quelques semaines, n'en ayant pas envie mais ne voyant pas d'autre avenue, il a donc consulté, et s'est fait prescrire des antidépresseurs. Ça ne fait pas encore effet. Il n'a toujours pas d'énergie, a toujours le moral à terre, n'est plus capable de se concentrer.

"C'est comme si je me voyais dépérir, conscient d'être en train de perdre mes forces, physiques autant que mentales," m'a-t-il dit, dans ses mots. Je sens qu'il sent que la fin est proche, et que ça soit vrai ou pas, ça n'a pas d'importance: il souffre, sa paix d'esprit s'est volatilisée, et moi je souffre de le voir ainsi.

"33 ans... t'es chanceux, mon gars... c'est un bel âge..." m'a-t-il dit; je me suis retenu pour ne pas lui dire que moi aussi je me sens dépérir, moi aussi je sens que je suis fragile et vulnérable et sur une pente descendante. Une fois de plus, je me suis retenu.


[22 mars 2008, 12:15 am]
P.S.: Le soir où il est venu chez moi, il nous a prêté une copie du film Across the Universe, nous le recommandant avec enthousiasme. Nous venons de le regarder, et ça me laisse perplexe. De toute évidence, quoique j’aie apprécié plusieurs aspects du film, j'ai le cerveau trop surchauffé pour être capable de me laisser aller à ce genre de conte de fée. Et c’est ce qui me frappe: que l’enthousiasme de mon père, que j’ai toujours connu comme quelqu’un de pragmatique et de vaguement réfractaire au sentimentalisme, soit dirigé si sincèrement vers ce qui, de par son essence même, est un conte, une romance. Je ne sais pas trop ce que je dis, je suis confus, mais il fallait que j'essaie de l’articuler.

12 mars 2008

Optique du jour

"when I wake up
in the morning
I pour the coffee
read the paper
then I slowly
and so softly
do the dishes
feed the fishes

sing me Happy Birthday
sing it like it's going to be your last day
like its hallelujah
don't just let it pass on through ya
it's a giant among cliches
and that's why I want you to sing it anyway
sing me Happy Birthday
'cause hell what's it all about
anyway

sing me Happy Birthday
Happy Birthday
like it's gonna be your last day
here on earth"
--- The Happy Birthday Song,
Andrew Bird

3 mars 2008

[Sur le vif]

De l'abstraction plein la tête, marcher dans les rues d'une petite ville, avec ou sans musique… vivre au rythme des nuages, de la luminosité… aller marcher en montagne avec mes garçons… par la fenêtre de ma maison, voir des arbres… une promenade après le souper, les rues vides… une lenteur généralisée, souvent pleine de mélancolie, pour faciliter la respiration… me concentrer sur mes textes, que ça soit ma raison d'être sans qu'on le prenne mal… que l'infini puisse cohabiter avec la minutie des agissements quotidiens… passer beaucoup plus de temps avec ma Compagne et mes enfants, ne plus me sentir toujours pressé, toujours limité… je ne rêve qu'à ça… et voici qu'on me l'offre, vaguement… mais je n'y crois pas.

Mais j'y pense.