5 juin 2006

Esquisse Printanière [ivre dans un autobus le 12 mai]

Mais où est-elle, où est-il, cet être humain avec qui je pourrais partager autre chose que les particularités de la race 'humaine', cette personne qui s'inquièterait et s'enivrerait de mes expériences, sans pour autant en être affectée, et avec qui je pourrais en faire de même? Mon Double, mon Versus (qu'importe son Sexe)?


* * *


J'ai le sourire plus facile que jamais, je vous accepte si facilement, je vois en vous l'internalisation des préceptes quasi sacrés de la génération de mes parents… comme eux vous vénérez les ivresses, vous adorez le coït, et les frontières sous toutes leurs formes vous abhorrent.


Musique, art, amour, jeux, partage, transes… vous en profitez pour aussi longtemps qu'il en est possible, et puis éventuellement, après quelques mois ou quelques années, ayant l'impression que vous n'en avez plus le choix, vous vous engagez dans une Profession.


(Profession de Foi, avant tout. Foi en un Jeu de Société dont les règlements implicites ne sont officialisés nulle part, sinon dans les pénalités conséquentes qu'ils entraînent lorsqu'on les enfreint.)L'heure est grave, oui, mais qui sait où nous en serions sans l'étourderie contestataire des années 60? Leur égoïsme sans fond et leur aveuglement ostentatoire était peut-être un moindre mal… et pour ça, malgré tout, je suis aujourd'hui capable de les remercier.


* * *


Chaque instant est un Écrasement Fabuleux pour qui sait s'en attribuer les prédispositions, pour qui peut s'en permettre le luxe mystique. Des strates nuageuses sans fin, une --- à tous moments --- richesse minéralogique presque royale, qu'il serait possible de s'empiler sur la colonne vertébrale.


Mais il y a un prix à payer; c'est toujours le cas. (Et c'est d'ailleurs à force d'ignorer cette réalité que nos parents en sont arrivés au sempiternel Constat d'Échec.) Tout est rotation, retour du pendule; après chaque Illumination il y a une Chute, après chaque Cérémonie il y a des Platitudes, après l'Orgasme il y a Relâchement.


* * *


Je suis prêt à me patenter une aventure pour atteindre un Lieu ou une Temporalité qui soit du Domaine de l'Aventure. Qui dit 'aventure' dit longueur, inconséquence de l'aboutissement, concentration sur l'immédiat, amour (et acceptation philosophique) de l'imprévu et de l'effort, capacité de se satisfaire simplement.


Qui dit mieux? Allez-y. Faites moi profiter de vos 'intellects supérieurs'. Mon humilité est Totale. Abasourdi en permanence, je ne demande qu'à me perdre dans une Forêt (qu'elle soit métaphorique ou le Fruit de l'alambique intellectuel d'un compagnon ou d'une compagne, ou tout simplement le reflet de mon environnement immédiat).


Pourquoi toutes vos lumières sont-elles éteintes? Au profit de quelle économie? C'est stupide mais je dois le demander.


* * *


J., où es-tu? J'aimerais tellement pouvoir te parler, juste pour que le Passé soit Passé, et pour savoir que tu vas bien, que tout n'est pas perdu, que mon premier amour est libre de tout enchaînement corrompu. Si seulement j'avais fait autre chose que t'observer.


* * *


Si je suis si saoul ce soir, c'est en hommage à mon oncle J. (ivrogne éternel et sanctifié, mort mais à jamais rebelle face à l'appauvrissement systématique de l'existence que nous dictent tous les Constats de toutes les époques nous précèdent); en l'honneur de H., mon [ex] meilleur ami, que j'imagine honnête et fidèle et intègre jusqu'au bout; en l'honneur de ma compagne M. qui m'aime et me serre contre elle pour je-ne-sais quelle raison; en l'honneur de ma sœur qui se rassasie des aventures encadrées que le show-biz entraîne et émane; pour mon père qui jamais n'articule de jugement face aux gagne-pains imbéciles (ou leur absence) que le soi-disant "Destin" lui met dans la face; pour ma mère qui maintient son cap de gipsy illuminée et condamnée dans une vie tellement, tellement morne; pour mes enfants, X. et C. et l'autre qui s'en vient, qui ont devant eux des défis inimaginés.


Texte enregistré à 10:15:00 PM 3 commentaires


Louise a dit...
Enfin il est apparu ce texte; merci. Je le savoure pleinement.
juin 06, 2006 12:05 PM

Methanalyse a dit…
"à jamais rebelle face à l'appauvrissement systématique de l'existence que nous dictent tous les Constats de toutes les époques nous précèdent"Dans le sens que la vie est moins riche de surprises et d'intants eureka parce que tout ou presque a été constaté? C'est bien vrai cela. Si c'est ce que tu veux dire. On pourra jamais réinventer la roue, va falloir trouver d'autre chose ou rester en dehors de tout ça comme ton oncle. Mais bon. J'sais pas trop si on est sur la même longueur d'onde là.
juin 14, 2006 3:00 PM

Simon a dit…
Bonjour Meth.Je ne sais pas si on dit la même chose, mais on est certainement sur la même longueur d'ondes.Ce que tu dis n'est pas faux, mais en fait ce que j'essayais d'exprimer ici c'est cette impression que j'ai qu'il y a un espèce d'inconscient collectif qui nous pèse sur les épaules, qui nous est bourré dans la bouche à la naissance, et qui est un peu plus pesant à chaque génération. Les conclusions les plus amères ont déjà été atteintes il y a cent, deux cents, trois cents ans, alors...Mais je me perds dans mes propres idées. Comme toujours.Salutations
juin 14, 2006 9:46 PM


Methanalyse a dit…
Ah ben voilà - oui oui c'est ça. Tu ne t'étais pas perdu, j'avais à peu près compris.
juin 15, 2006 8:50 PM

Aucun commentaire: